LA PHOTOGRAPHIE SPIRITE
par Gabriel Delanne
J’ai rapporté dans mes articles un certain nombre de cas d’apparitions collectives de défunts qui prouvent, suivant moi, la réalité indiscutable de la survivance de l’être qui se manifeste. Les métapsychistes ne nous donnent aucune explication satisfaisante de ces phénomènes.
Dans la plupart des exemples que j’ai cités, il n’est pas possible d’attribuer la création du fantôme posthume à une action télépathique d’une personne vivante quelconque. D’ailleurs cette hypothèse se heurterait à l’impossibilité de faire éprouver une impression mentale identique à tous les témoins, surtout lorsque c’est successivement que l’apparition est perçue ; mieux encore : il serait impossible d’imaginer comment dans le cas du révérend Jup, par exemple, celui-ci verrait une forme lumineuse flottant au-dessus du berceau de l’enfant, tandis que celui-ci reconnaît distinctement sa mère. Qui donc aurait pu exercer une action télépathique à ce moment ? Si la pensée de l’enfant avait été la cause agissante, elle n’aurait eu aucune espèce de raison pour se traduire chez le révérend par une simple action lumineuse, sans lui donner en même temps la sensation du portrait de la mère.
La cryptesthésie ne peut pas être invoquée non plus pour tous les témoins d’une apparition collective, car ces personnes n’ont jamais, d’une manière générale, indiqué qu’elles possédassent cette faculté à un degré quelconque, et même si cela était, il faudrait quand même supposer que pour qu’elle s’exerce, il existât à l’endroit de l’espace une cause agissante capable de provoquer la vision.
Tant que les métapsychistes ne nous auront pas expliqué clairement comment ces phénomènes seraient possibles sans l’intervention des esprits, nous persisterons à les considérer comme des démonstrations directes et évidentes de la survie.
Mais il y a mieux encore ; si l’on arrive à photographier des apparitions, alors même qu’elles seraient invisibles pour l’oeil, il faut en conclure nécessairement qu’il existe à l’endroit de l’espace indiqué par la plaque sensible un être qui possède le pouvoir d’agir sur les sels d’argent. C’est une démonstration directe et incontestable de l’objectivité des Esprits, et c’est pour cela que les psychistes nient avec persistance la possibilité d’un semblable phénomène.
Nous ne devons pas nous laisser influencer par ces négations, car toutes les autres manifestations spirites ont été repoussées avec le même parti pris. Cependant peu à peu les uns après les autres ont été authentifiés par des chercheurs indépendants, et il en sera de même pour la photographie des Esprits. Sans aucun doute on peut très facilement et de différentes manières truquer des plaques, mais connaissant ces possibilités d’erreurs, c’est aux chercheurs à se mettre en garde contre la supercherie ; d’ailleurs il est des cas où toute suspicion est impossible ; c’est lorsque sur la plaque on trouve l’image d’une personne inconnue de l’opérateur et de tous les assistants, mais qui est identifiée plus tard avec un être ayant réellement vécu sur la Terre.
Voici d’abord un rapport qui répond à toutes ces conditions.
Le portrait de Mme Bonner
Voici un rapport qui a été publié dans le journal américain The Banner of Light du 25 janvier 1873. L’auteur, M. Bromson Murray, est un spiritualiste de New York, bien connu, qui a fait partie de commissions qui ont démasqué les impostures de faux médiums: sa narration doit donc être considérée comme exemple de crédulité ; elle s’appuie d’ailleurs sur l’affirmation concordante de M. Bonner, le véritable intéressé dans le phénomène ; comme toujours je reproduis fidèlement l’original.
Monsieur le Directeur,
Dans les derniers jours de septembre dernier, Mme N. H. Mumler, de notre ville (Boston, 170, Nest Springfield Sreet) se trouvant dans un état de transe, au cours duquel elle donnait des conseils médicaux à l’une de ses malades, s’interrompit soudain pour me dire que, lorsque M. Mumler ferait ma photographie, sur la même plaque il apparaîtrait à côté de mon portrait l’image d’une femme, tenant d’une main une ancre faite de fleurs ; cette femme désirait ardemment annoncer sa survivance à son mari, et vainement elle avait cherché jusqu’alors une occasion de se rapprocher de lui, elle croyait y arriver par mon intermédiaire.
Mme Mumler ajouta : « Au moyen d’une loupe on pourra distinguer sur celte plaque les lettres : R, Bonner. je lui demandai en vain si ces lettres ne signifiaient pas Robert Bonner. Au moment où je me préparai à poser pour avoir ma photographie, je tombai en transe, malgré tous mes efforts à me mettre dans la position voulue.
Il lui fut impossible de me faire rester droit et de m’appuyer la tête contre le support. Mon portrait fut par conséquent pris dans la situation que l’épreuve indique, et, à côté, apparut la figure de femme avec l’encre et les lettres composées de boutons de fleurs, ainsi que cela m’avait été prédit. Malheureusement, je ne connaissais personne du nom de Bonner, personne qui pût reconnaître l’identité de la figure photographiée. De retour dans la ville, je racontai à plusieurs personnes ce qui m’était arrivé; l’une d’elles me dit avoir récemment rencontré un M. Bonner, de Géorgie, elle désirait lui faire voir la photographie. Quinze jours plus tard elle me fit prier de passer chez elle. Quelques instants après un visiteur entra, c’était M. Robert Bonner. Il me dit que la photographie était celle de sa femme, qu’il l’avait vue chez la dame en question et qu’il trouvait la ressemblance parfaite. Personne ici ne conteste d’ailleurs la ressemblance que cette photographie présente avec un portrait de Mme Bonner deux ans avant sa mort.
Mais ce n’est pas tout. Dès que M. Bonner eut vu mon épreuve, il écrivit une lettre à sa femme, à laquelle il posait diverses questions. Il prit toutes les précautions pour être certain que la lettre ne serait pas ouverte et l’expédia par la poste au Dr Flint (1) à New York.
Le lendemain la lettre lui revint non décachetée, et contenant une réponse de sept pages. Dans cette communication, signée de son petit nom : Ella, Mme Bonner disait qu’elle avait demandé la permission d’apparaître sur ma plaque, comme elle l’avait fait ; elle lui affirmait que les deux frères de M. Bonner, William et Hamilton, se trouvaient avec elle, ainsi que son vieil ami Sam Craig ; elle devait écrire sous peu par l’intermédiaire de M. Flint, une lettre à son jeune fils Hammie ; elle ajoutait que M. R. la soignait bien et le priait ensuite de serendre à Boston, chez le photographe spirite, affirmant qu’elle apparaîtrait avec lui sur la même plaque, tenant une couronne de fleurs d’une main, portant une deuxième couronne sur la tête, tandis que son autre main montrerait le ciel. J’ai lu tout ce qui précède dans cette lettre, M. Bonner ajouta : «Demain j’irai à Boston sans dire mon nom à qui que ce soit ».
Quatre jours après, M. Bonner vint me trouver, il avait été à Boston sans se faire connaître à personne et avait, cependant, obtenu la photographie promise, avec l’image de sa femme exactement comme elle l’avait écrite. (La couronne que sa femme tient à la main est à peine visible sur la phototypie). Toutes les personnes désireuses de s’assurer du fait peuvent voir ces photographies chez M. Mumler, à Boston ou chez moi, à New York ; M. Bonner est un homme très connu en Géorgie et dans l’Alabama. Ceux qui me connaissent savent que je n’ai aucun profit à publier ce récit dont je certifie l’exactitude.
Je demande aux métapsychistes s’ils peuvent nous expliquer logiquement un tel ensemble de faits en dehors de
l’interprétation spirite.
Pour les sceptiques qui récusent les rapports qui nous arrivent d’Amérique, je vais rappeler un autre cas intéressant qui fut relaté par le grand journaliste anglais William Stead.
LA PHOTOGRAPHIE POSTHUME DE PIET-BOTHA
J’ai parlé de la photographie des Esprits. Je m’empresse de désarmer le lecteur sceptique en admettant qu’il n’y a rien de plus facile que de truquer des photographies de ce genre, et j’ajouterai qu’un prestidigitateur peut toujours tromper l’observateur le plus vigilant et le plus défiant. Les plaques dont je me sers en les développant moi-même et qui sont, de plus marquées, fourniraient quelque garantie contre les fraudes. Mais, si je crois à l’authenticité des
photographies, c’est que je m’appuie sur des arguments autrement concluants. La preuve formelle de l’authenticité d’une photographie d’un Eprit, c’est d’abord l’exécution d’un portrait parfaitement reconnaissable de la personne défunte par un photographe qui ne sait absolument rien de l’existence de cette personne, et c’est ensuite le fait qu’aucune forme Apparition de Mme Bonner avec son mari visible n’est perçue par celui qui opère ou qui assiste à l’opération.
J’ai obtenu de ces photographies non pas une fois seulement, mais à plusieurs reprises. Je n’en rapporterai ici qu’un seul cas. Le photographe à qui sa médiumnité permet de photographier l’invisible est un artiste déjà vieux sans instruction. Cette particularité l’empêche même, ans certaines circonstances, de s’occuper sérieusement de sa profession. II est clairvoyant et ce que j’appellerai clairaudiant. Pendant la dernière guerre des Boers, j’allai lui demander une séance, curieux de savoir ce qui allait se passer. J’avais à peine pris place devant le vieuxbonhomme qu’il me dit :
J’ai eu une algarade l’autre jour. Un vieux Boer est venu dans mon atelier. 11 avait un fusil et son regard farouche me causa une certaine frayeur. « Va-t-en, lui dis-je, je n’aime pas les armes à feu ». Et il s’en alla. Mais il est revenu et le revoilà. Il est rentré avec vous. Il n’est plus armé de son fusil et son regard n’a rien de farouche. Faut il lui permettre de rester ?
- Certainement, répondis-je, vous croyez pouvoir le photographier ?
- Je ne sais pas, dit le vieux ; j’essaierai.
Je m’assis devant l’objectif et l’opérateur prit le point, je ne pouvais rien, mais avant
l’enlèvement de la plaque je demandai au photographe :
- Vous lui avez parlé, l’autre jour. Pouvez-vous lui parler encore maintenant ?
- Oui, il est toujours derrière vous.
- Vous répondra-t-il si vous l’interrogez ?
- je ne sais pas, j’essaierai.
- Demandez-lui son nom ?
Le photographe eut l’air d’adresser une question mentale et d’attendre la réponse. Puis il dit :
- Il dit qu’il s’appelle Piet Botha
- Piet Botha ? objectai-je avec un geste de doute, je connais un Philippe, un Louis, un Christian, et je ne sais combien d’autres Botha, mais je n’ai jamais entendu parler de ce Piet.
- Il dit que c’est son nom, répliqua le vieux d’un air bourru.
Quand il développa la plaque, j’y vis debout derrière moi, un grand gaillard hirsute qui pouvait être tout aussi bien un Boer qu’un moujik. Je ne dis rien, mais attendis jusqu’à la fin de la guerre, et, à l’arrivée du général Botha à Londres, je lui envoyai la photographie par l’intermédiaire de M. Fischer, maintenant premier ministre de l’Etat d’Orange. Le lendemain M. Nessels, délégué d’un autre Etat, vint me voir.
- Où avez vous pris cette photographie que vous avez donnée à M. Fischer ?
Je lui rapportai exactement comment elle se trouvait en ma possession. Il hocha la tête :
Je ne crois pas aux revenants, mais dites-moi sérieusement d’où vous vient ce portrait ; cet homme-là n’a jamais connu William Stead. Cet homme là n’a jamais mis le pied en Angleterre.
- Je vous ai dit, repartis-je, comment je l’ai eue et vous pouvez ne pas me croire, mais pourquoi vous monter comme cela ?
- Parce que, dit-il, cet homme là était un de mes parents, j’ai son portrait, chez moi.
- Vraiment, m’écriai-je, est il mort ?
- Il fut le premier commandant boer qui périt au siège de Kimberley, Pétrus Botha, ajouta-t il, mais nous l’appelions Piet pour abréger.
Cette photographie est restée en ma possession. Elle fut également identifiée par les autres délégués des Etats libres qui avaient eux aussi connu Piet Botha. Or ceci ne s’explique point par la télépathie. Il ne saurait y avoir non plus ni hypothèse ni fraude. C est par un simple hasard que je demandai au photographe de s’assurer si l’Esprit
donnerait son nom. Personne en Angleterre, pour autant que j’aie pu m’en convaincre, ne savait que Piet Botha eût jamais existé.
Voici donc un témoignage tout à fait authentique émanant d’un homme dont la loyauté n’a jamais fait de doute pour personne, et comme il s’agit de la photographie d’un obscur habitant de l’Afrique Australe qui n’avait jamais mis les pieds en Angleterre, je demande que l’on veuille bien m’expliquer par quelques théories que ce soit comment
on aurait pu obtenir ce portrait de Piet Botha si celui-ci ne s’était pas présenté en Esprit devant l’objectif.
(1) Pour bien comprendre, le lecteur doit savoir que M. Flint, de même que M. Mansfield, était un médium toutspécial : on lui envoyait des lettres cachetées, adressées à des personnes défuntes. Ces lettres étaient renvoyées à leurs auteurs avec les réponses des destinataires, bien entendu sans avoir été ouvertes»
(Notes d’Aksakof).
J’ai rapporté dans mes articles un certain nombre de cas d’apparitions collectives de défunts qui prouvent, suivant moi, la réalité indiscutable de la survivance de l’être qui se manifeste. Les métapsychistes ne nous donnent aucune explication satisfaisante de ces phénomènes.
Dans la plupart des exemples que j’ai cités, il n’est pas possible d’attribuer la création du fantôme posthume à une action télépathique d’une personne vivante quelconque. D’ailleurs cette hypothèse se heurterait à l’impossibilité de faire éprouver une impression mentale identique à tous les témoins, surtout lorsque c’est successivement que l’apparition est perçue ; mieux encore : il serait impossible d’imaginer comment dans le cas du révérend Jup, par exemple, celui-ci verrait une forme lumineuse flottant au-dessus du berceau de l’enfant, tandis que celui-ci reconnaît distinctement sa mère. Qui donc aurait pu exercer une action télépathique à ce moment ? Si la pensée de l’enfant avait été la cause agissante, elle n’aurait eu aucune espèce de raison pour se traduire chez le révérend par une simple action lumineuse, sans lui donner en même temps la sensation du portrait de la mère.
La cryptesthésie ne peut pas être invoquée non plus pour tous les témoins d’une apparition collective, car ces personnes n’ont jamais, d’une manière générale, indiqué qu’elles possédassent cette faculté à un degré quelconque, et même si cela était, il faudrait quand même supposer que pour qu’elle s’exerce, il existât à l’endroit de l’espace une cause agissante capable de provoquer la vision.
Tant que les métapsychistes ne nous auront pas expliqué clairement comment ces phénomènes seraient possibles sans l’intervention des esprits, nous persisterons à les considérer comme des démonstrations directes et évidentes de la survie.
Mais il y a mieux encore ; si l’on arrive à photographier des apparitions, alors même qu’elles seraient invisibles pour l’oeil, il faut en conclure nécessairement qu’il existe à l’endroit de l’espace indiqué par la plaque sensible un être qui possède le pouvoir d’agir sur les sels d’argent. C’est une démonstration directe et incontestable de l’objectivité des Esprits, et c’est pour cela que les psychistes nient avec persistance la possibilité d’un semblable phénomène.
Nous ne devons pas nous laisser influencer par ces négations, car toutes les autres manifestations spirites ont été repoussées avec le même parti pris. Cependant peu à peu les uns après les autres ont été authentifiés par des chercheurs indépendants, et il en sera de même pour la photographie des Esprits. Sans aucun doute on peut très facilement et de différentes manières truquer des plaques, mais connaissant ces possibilités d’erreurs, c’est aux chercheurs à se mettre en garde contre la supercherie ; d’ailleurs il est des cas où toute suspicion est impossible ; c’est lorsque sur la plaque on trouve l’image d’une personne inconnue de l’opérateur et de tous les assistants, mais qui est identifiée plus tard avec un être ayant réellement vécu sur la Terre.
Voici d’abord un rapport qui répond à toutes ces conditions.
Le portrait de Mme Bonner
Voici un rapport qui a été publié dans le journal américain The Banner of Light du 25 janvier 1873. L’auteur, M. Bromson Murray, est un spiritualiste de New York, bien connu, qui a fait partie de commissions qui ont démasqué les impostures de faux médiums: sa narration doit donc être considérée comme exemple de crédulité ; elle s’appuie d’ailleurs sur l’affirmation concordante de M. Bonner, le véritable intéressé dans le phénomène ; comme toujours je reproduis fidèlement l’original.
Monsieur le Directeur,
Dans les derniers jours de septembre dernier, Mme N. H. Mumler, de notre ville (Boston, 170, Nest Springfield Sreet) se trouvant dans un état de transe, au cours duquel elle donnait des conseils médicaux à l’une de ses malades, s’interrompit soudain pour me dire que, lorsque M. Mumler ferait ma photographie, sur la même plaque il apparaîtrait à côté de mon portrait l’image d’une femme, tenant d’une main une ancre faite de fleurs ; cette femme désirait ardemment annoncer sa survivance à son mari, et vainement elle avait cherché jusqu’alors une occasion de se rapprocher de lui, elle croyait y arriver par mon intermédiaire.
Mme Mumler ajouta : « Au moyen d’une loupe on pourra distinguer sur celte plaque les lettres : R, Bonner. je lui demandai en vain si ces lettres ne signifiaient pas Robert Bonner. Au moment où je me préparai à poser pour avoir ma photographie, je tombai en transe, malgré tous mes efforts à me mettre dans la position voulue.
Il lui fut impossible de me faire rester droit et de m’appuyer la tête contre le support. Mon portrait fut par conséquent pris dans la situation que l’épreuve indique, et, à côté, apparut la figure de femme avec l’encre et les lettres composées de boutons de fleurs, ainsi que cela m’avait été prédit. Malheureusement, je ne connaissais personne du nom de Bonner, personne qui pût reconnaître l’identité de la figure photographiée. De retour dans la ville, je racontai à plusieurs personnes ce qui m’était arrivé; l’une d’elles me dit avoir récemment rencontré un M. Bonner, de Géorgie, elle désirait lui faire voir la photographie. Quinze jours plus tard elle me fit prier de passer chez elle. Quelques instants après un visiteur entra, c’était M. Robert Bonner. Il me dit que la photographie était celle de sa femme, qu’il l’avait vue chez la dame en question et qu’il trouvait la ressemblance parfaite. Personne ici ne conteste d’ailleurs la ressemblance que cette photographie présente avec un portrait de Mme Bonner deux ans avant sa mort.
Mais ce n’est pas tout. Dès que M. Bonner eut vu mon épreuve, il écrivit une lettre à sa femme, à laquelle il posait diverses questions. Il prit toutes les précautions pour être certain que la lettre ne serait pas ouverte et l’expédia par la poste au Dr Flint (1) à New York.
Le lendemain la lettre lui revint non décachetée, et contenant une réponse de sept pages. Dans cette communication, signée de son petit nom : Ella, Mme Bonner disait qu’elle avait demandé la permission d’apparaître sur ma plaque, comme elle l’avait fait ; elle lui affirmait que les deux frères de M. Bonner, William et Hamilton, se trouvaient avec elle, ainsi que son vieil ami Sam Craig ; elle devait écrire sous peu par l’intermédiaire de M. Flint, une lettre à son jeune fils Hammie ; elle ajoutait que M. R. la soignait bien et le priait ensuite de serendre à Boston, chez le photographe spirite, affirmant qu’elle apparaîtrait avec lui sur la même plaque, tenant une couronne de fleurs d’une main, portant une deuxième couronne sur la tête, tandis que son autre main montrerait le ciel. J’ai lu tout ce qui précède dans cette lettre, M. Bonner ajouta : «Demain j’irai à Boston sans dire mon nom à qui que ce soit ».
Quatre jours après, M. Bonner vint me trouver, il avait été à Boston sans se faire connaître à personne et avait, cependant, obtenu la photographie promise, avec l’image de sa femme exactement comme elle l’avait écrite. (La couronne que sa femme tient à la main est à peine visible sur la phototypie). Toutes les personnes désireuses de s’assurer du fait peuvent voir ces photographies chez M. Mumler, à Boston ou chez moi, à New York ; M. Bonner est un homme très connu en Géorgie et dans l’Alabama. Ceux qui me connaissent savent que je n’ai aucun profit à publier ce récit dont je certifie l’exactitude.
Bromson Murray.
233 West 52, d Street, New York City. Ce 7 janvier 1873
A moins de supposer, ce qui est tout à fait invraisemblable, une collusion entre les différents personnages qui sont cités, nous sommes bien en présence d’un véritable phénomène spirite, car le photographe Mumler, accusé de supercherie par des incrédules, fut acquitté par le tribunal à la suite de plusieurs rapports d’experts photographes qui avaient pris toutes les précautions pour rendre l’expérience concluante, Remarquons que l’Esprit de Mme Bonner n’est pas ce que les occultistes appelleraient un cliché astral puisqu’elle a modifié sa pose dans les deux portraits que nous reproduisons. Dans ses communications par l’intermédiaire de M. Flint elle fait preuve des connaissances que possédait Mme Bonner de son vivant, c’est donc bien l’individualité persistante de cette dame qui s’est manifestée par ces divers procédés et au moyen de médiums qui ne l’avaient jamais connue.233 West 52, d Street, New York City. Ce 7 janvier 1873
Je demande aux métapsychistes s’ils peuvent nous expliquer logiquement un tel ensemble de faits en dehors de
l’interprétation spirite.
Pour les sceptiques qui récusent les rapports qui nous arrivent d’Amérique, je vais rappeler un autre cas intéressant qui fut relaté par le grand journaliste anglais William Stead.
LA PHOTOGRAPHIE POSTHUME DE PIET-BOTHA
J’ai parlé de la photographie des Esprits. Je m’empresse de désarmer le lecteur sceptique en admettant qu’il n’y a rien de plus facile que de truquer des photographies de ce genre, et j’ajouterai qu’un prestidigitateur peut toujours tromper l’observateur le plus vigilant et le plus défiant. Les plaques dont je me sers en les développant moi-même et qui sont, de plus marquées, fourniraient quelque garantie contre les fraudes. Mais, si je crois à l’authenticité des
photographies, c’est que je m’appuie sur des arguments autrement concluants. La preuve formelle de l’authenticité d’une photographie d’un Eprit, c’est d’abord l’exécution d’un portrait parfaitement reconnaissable de la personne défunte par un photographe qui ne sait absolument rien de l’existence de cette personne, et c’est ensuite le fait qu’aucune forme Apparition de Mme Bonner avec son mari visible n’est perçue par celui qui opère ou qui assiste à l’opération.
J’ai obtenu de ces photographies non pas une fois seulement, mais à plusieurs reprises. Je n’en rapporterai ici qu’un seul cas. Le photographe à qui sa médiumnité permet de photographier l’invisible est un artiste déjà vieux sans instruction. Cette particularité l’empêche même, ans certaines circonstances, de s’occuper sérieusement de sa profession. II est clairvoyant et ce que j’appellerai clairaudiant. Pendant la dernière guerre des Boers, j’allai lui demander une séance, curieux de savoir ce qui allait se passer. J’avais à peine pris place devant le vieuxbonhomme qu’il me dit :
J’ai eu une algarade l’autre jour. Un vieux Boer est venu dans mon atelier. 11 avait un fusil et son regard farouche me causa une certaine frayeur. « Va-t-en, lui dis-je, je n’aime pas les armes à feu ». Et il s’en alla. Mais il est revenu et le revoilà. Il est rentré avec vous. Il n’est plus armé de son fusil et son regard n’a rien de farouche. Faut il lui permettre de rester ?
- Certainement, répondis-je, vous croyez pouvoir le photographier ?
- Je ne sais pas, dit le vieux ; j’essaierai.
Je m’assis devant l’objectif et l’opérateur prit le point, je ne pouvais rien, mais avant
l’enlèvement de la plaque je demandai au photographe :
- Vous lui avez parlé, l’autre jour. Pouvez-vous lui parler encore maintenant ?
- Oui, il est toujours derrière vous.
- Vous répondra-t-il si vous l’interrogez ?
- je ne sais pas, j’essaierai.
- Demandez-lui son nom ?
Le photographe eut l’air d’adresser une question mentale et d’attendre la réponse. Puis il dit :
- Il dit qu’il s’appelle Piet Botha
- Piet Botha ? objectai-je avec un geste de doute, je connais un Philippe, un Louis, un Christian, et je ne sais combien d’autres Botha, mais je n’ai jamais entendu parler de ce Piet.
- Il dit que c’est son nom, répliqua le vieux d’un air bourru.
Quand il développa la plaque, j’y vis debout derrière moi, un grand gaillard hirsute qui pouvait être tout aussi bien un Boer qu’un moujik. Je ne dis rien, mais attendis jusqu’à la fin de la guerre, et, à l’arrivée du général Botha à Londres, je lui envoyai la photographie par l’intermédiaire de M. Fischer, maintenant premier ministre de l’Etat d’Orange. Le lendemain M. Nessels, délégué d’un autre Etat, vint me voir.
- Où avez vous pris cette photographie que vous avez donnée à M. Fischer ?
Je lui rapportai exactement comment elle se trouvait en ma possession. Il hocha la tête :
Je ne crois pas aux revenants, mais dites-moi sérieusement d’où vous vient ce portrait ; cet homme-là n’a jamais connu William Stead. Cet homme là n’a jamais mis le pied en Angleterre.
- Je vous ai dit, repartis-je, comment je l’ai eue et vous pouvez ne pas me croire, mais pourquoi vous monter comme cela ?
- Parce que, dit-il, cet homme là était un de mes parents, j’ai son portrait, chez moi.
- Vraiment, m’écriai-je, est il mort ?
- Il fut le premier commandant boer qui périt au siège de Kimberley, Pétrus Botha, ajouta-t il, mais nous l’appelions Piet pour abréger.
Cette photographie est restée en ma possession. Elle fut également identifiée par les autres délégués des Etats libres qui avaient eux aussi connu Piet Botha. Or ceci ne s’explique point par la télépathie. Il ne saurait y avoir non plus ni hypothèse ni fraude. C est par un simple hasard que je demandai au photographe de s’assurer si l’Esprit
donnerait son nom. Personne en Angleterre, pour autant que j’aie pu m’en convaincre, ne savait que Piet Botha eût jamais existé.
Voici donc un témoignage tout à fait authentique émanant d’un homme dont la loyauté n’a jamais fait de doute pour personne, et comme il s’agit de la photographie d’un obscur habitant de l’Afrique Australe qui n’avait jamais mis les pieds en Angleterre, je demande que l’on veuille bien m’expliquer par quelques théories que ce soit comment
on aurait pu obtenir ce portrait de Piet Botha si celui-ci ne s’était pas présenté en Esprit devant l’objectif.
(1) Pour bien comprendre, le lecteur doit savoir que M. Flint, de même que M. Mansfield, était un médium toutspécial : on lui envoyait des lettres cachetées, adressées à des personnes défuntes. Ces lettres étaient renvoyées à leurs auteurs avec les réponses des destinataires, bien entendu sans avoir été ouvertes»
(Notes d’Aksakof).